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[278] Appel de textes | Dossier thématique : Simulacres

Combien de couches doit-on gratter avant d’atteindre la vérité? Comment une autorité peut-elle s’installer et installer avec elle une norme, un narratif qu’elle contrôle? Quel est l’espace du doute, quel est le poids de la preuve? 

L’enchevêtrement entre l’art et le politique, entre l’art et la politique : voilà un thème qui court depuis la nuit des temps. Dans l’histoire de l’art occidentale, rares sont les productions qui, même aux balbutiements institutionnels du domaine, n’étaient pas assujetties à une certaine forme de mécénat, les rendant étroitement liées à la classe politique, qui s’avérait détenir la condition sine qua non de leur existence-même. En réponse d’ailleurs à cela sont nées nombre d’œuvres d’artistes qui, exclu·e·s des codes en vogue, se dégottaient des lieux d’exposition non traditionnels afin de donner à voir aux yeux du monde ce qui se tramait dans la marge, dans la contre-culture.  

Si l’on fait basculer le positionnement, il ne faut pas réfléchir longtemps pour constater que toutes les productions artistiques décoloniales, qu’elles soient théoriques ou pratiques, sont par nature intrinsèquement politiques : elles forcent un déplacement du regard et revisitent ce qui a été érigé en normes et canons dans une perspective de réappropriation et de réécriture historiques, imposant de considérer l’écologie de toutes les pratiques qui forment la trame de l’art, rompant avec l’autorité et le pouvoir sur les narratifs que s’est donnés l’Occident. 

Le dernier siècle a connu une succession impressionnante de courants artistiques tous plus politiques les uns que les autres : c’est qu’ils se constituaient toujours en réponse à leur environnement, qu’ils réagissaient. Les décennies qui se sont dernièrement écoulées témoignent de façon encore plus exacerbée de cette tendance – et force – qu’a l’art de s’inscrire, qu’on le veuille ou non, en complète fusion avec l’ère qu’il traverse. Toute production culturelle, en fait, nous dit quelque chose du monde dans lequel on vit; et par ailleurs, force est d’admettre qu’à peu près tout ce qui existe est politique – ou prétend l’être – et possède une retombée qui le sera invariablement aussi. 

Ne réinventant pas cette roue, nous cherchons pour le numéro 278 de la revue Vie des arts à nous mettre humblement au diapason de ce qui nous entoure : nous souhaitons démystifier, dans ce qu’elles ont de plus politiques, toutes ces distorsions qui flottent actuellement dans l’air ambiant. Des dernières tendances technologiques qui redéfinissent les critères de ce que sont le réel et l’hyperréel, aux discours politiques actuels si simplistes qu’ils en viennent à trafiquer les certitudes, où tient encore la valeur du fait, et de quelles manières peut-on dénoncer les impostures anxiogènes qui se multiplient? Irrémédiablement engagée, la thématique des simulacres invite à examiner les terreurs à venir, qui découlent de manipulations variables, et à envisager à la fois les pratiques en art qui travaillent à partir de ces matériaux et motifs et les réponses que ces pratiques elles-mêmes peuvent fournir dans un monde bouleversant et bouleversé. 

Comment déceler le vrai du faux? Comment décerner le mensonge dans la vérité? Comment distinguer le bon grain de l’ivraie? 

Plus encore, nous cherchons à comprendre qui sont tous ces colosses dirigeant actuellement le monde. Sur quelles fondations s’appuient-ils, et qui sont les gens qui les appuient en retour? Depuis quelques années, des statues sont détruites, un déboulonnage a lieu, une réécriture semble, malgré toute la résistance qu’effectue l’ordre établi, possible. L’art peut-il dans nos contextes actuels être et rester subversif, sans nécessairement tomber dans la censure ou l’annulation? Nous pensons que oui; nous pensons que l’art n’a pas le choix; nous pensons que l’art, par définition, peut d’ailleurs difficilement être et rester autre chose. Après tout, ces colosses ne sont-ils pas seulement, peut-être, des colosses aux pieds d’argile? 

Ainsi Vie des arts voudra considérer les propositions qui, à leur échelle, sont ou peuvent être révolutionnaires dans leur(s) manière(s) d’appréhender les déviances et déviations que le monde laisse entrevoir ces jours-ci. Peut-être peuvent-elles aussi, dans leur forme, faire état de distorsions plurielles… 

 

Pour nous soumettre une proposition  

Les soumissions attendues peuvent prendre la forme d’entretiens, de portraits d’artistes, de récits visuels, d’essais théoriques ciblant un·e ou plusieurs artistes et proposant des regroupements, etc. La forme est libre ! Nous sommes ouvertes aux suggestions.  

Toutes les soumissions pour le dossier doivent comprendre une note d’intention en lien avec la thématique, incluant le sujet anticipé (350 mots), la liste des artistes et des œuvres qui seront analysés dans le texte (s’il y a lieu), trois extraits de textes antérieurs (publiés ou non) ainsi qu’une courte biographie de l’autrice ou de l’auteur et être envoyées à redaction@viedesarts.com avant le 22 avril 2025. Nous ferons un suivi avec les autrices et les auteurs pressenti·e·s, et les textes finaux, suivant la commande préalablement effectuée par la rédaction, devront être rendus au courant du mois de mai 2025. Les textes paraîtront dans le numéro 278 de la revue, à la fin du mois d’août 2025.

À noter qu’à ce stade, nous désirons recevoir des notes d’intentions (350 mots) et non des articles complets. Les propositions d’artistes portant sur leur propre travail ne seront pas considérées. 

 

Rubriques récurrentes 

Puisque les numéros de Vie des arts ne portent pas exclusivement sur le dossier thématique, nous vous invitons également à nous soumettre un article hors-dossier, dans le cadre de nos rubriques récurrentes (perspectives, visites, essais, lectures). Pour nous soumettre une proposition, rendez-vous sur la page Collaborer