Artiste autodidacte, Karine Giboulo travaille depuis près de douze ans l’aquarelle et la sculpture sous forme de dioramas. Ses petits personnages en argile polymère campés dans des univers très variés, où elle met en scène les problématiques sociales qu’elle observe autour d’elle et durant ses voyages, ne sont pas restés longtemps inaperçus. Forte des encouragements reçus de la part de quelques musées et centres d’art au Canada et à l’étranger, elle poursuit activement ses activités à Montréal1. Comment perçoit-elle son statut d’artiste autodidacte ?

« Dans mon cas, ne pas faire des études d’art a été un choix : j’ai essayé pendant une demi-année d’étudier l’art au Cégep, mais je n’ai pas du tout accroché ; je n’ai pas supporté de me faire imposer quoi faire et je ne voyais pas en quoi les cours allaient nourrir ma création. Toute la technique que j’ai développée pour réaliser mes œuvres, je l’ai apprise sur le tas. Ma culture en art n’est donc pas le résultat d’une étude systématique : elle se développe au fur et à mesure de ma production et de l’intérêt que j’éprouve pour divers mouvements artistiques ou à l’égard des œuvres que j’observe et des expositions que je visite.

Toute la technique que j’ai développée pour réaliser mes œuvres, je l’ai apprise sur le tas.

Quand on commence à montrer son travail, la difficulté consiste à être prise au sérieux. Vers l’âge de 18 ans, je me suis mise à envoyer des dossiers et des demandes de bourses, un peu partout ; devant les refus, je ne me suis pas laissé décourager. Puis un jour, la Galerie SAS m’a proposé d’exposer mes œuvres. C’est ainsi que j’ai démarré. J’avais 24 ans. J’ai eu de la chance, mais je me suis battue pour obtenir ma première exposition. Aux yeux de beaucoup de spécialistes, il est quasi impossible d’être une artiste autodidacte. J’en ai bien conscience et justement, ça me motive. J’ai bénéficié d’encouragements très importants : par exemple, l’achat d’une œuvre (All you Can Eat) par le Musée des beaux-arts de Montréal ou la collaboration avec la Galerie Art Mûr. La compétition dans l’art actuel est très forte, j’en suis bien consciente.

Ma conviction de réussir comme artiste vient vraiment de moi-même. Je ne proviens pas d’un milieu artistique ; je fais plutôt office de mouton noir dans ma famille. Enfant, je voulais déjà devenir artiste. Il faut vraiment persévérer. Avec le recul, la voie pleine d’embûches que je me suis choisie a été bénéfique pour moi. Être autodidacte oblige à acquérir le sens de la discipline personnelle, qu’on s’impose au quotidien. La réalisation des œuvres que je conçois exige un temps très long, semblable à celui requis pour réaliser une grande tapisserie ou un roman, leur caractère méditatif me convient bien.

Mon travail se nourrit de ma curiosité pour le monde extérieur et pour l’évolution de la société : elle suscite chez moi un questionnement sans fin. Je regarde beaucoup de reportages et je documente soigneusement mes voyages qui deviennent un réservoir d’idées. »

Extrait d’un entretien téléphonique à Montréal, le 10 novembre.