Les nouvelles technologies permettraient-elles de repenser le concept de collage ? Telle est la question — radicale — que posent Sébastien Cliche et Alex McLeod. Tous deux revisitent le genre, soit pour produire des effets de collage, soit pour transposer ce mode de production d’images dans le domaine du virtuel.

Pour l’exposition Ailleurs, Sébastien Cliche présentera deux œuvres de la série Surveillance : Rivière (2008) et Château (2010). Il s’agit de deux photomontages réalisés par superposition et /ou juxtaposition, mais qui n’ont pas été conçus selon la même logique constructive. Si Rivière joue essentiellement avec la superposition d’images (un paysage au milieu duquel coule une rivière et des taches lumineuses), Château joue plutôt avec de multiples effets visuels procédant autant par ajout que par soustraction. C’est que l’artiste ne limite pas la composition de ses images à une multiplication de couches, il trouve dans le retranchement un moyen singulier d’exacerber certaines zones. Textures, couleurs et lumières sont ainsi manipulées de manière à révéler l’ambigüité du temps et des lieux. Les univers qu’elles permettent de composer sont généralement intrigants, souvent menaçants, parfois apaisants, c’est selon ! Peut-être est-ce parce qu’ils offrent à la réalité des lieux et des objets une ambiance féérique ou un environnement science fictionnel, à saveur surnaturel !

Du surnaturel, on passe au surréel avec Alex McLeod. Là encore, il s’agit d’impressions numériques, mais cette fois elles ne proviennent pas de photographies : les œuvres sont intégralement construites grâce à des logiciels 3D utilisés habituellement pour le cinéma. L’artiste crée des environnements en relief en réalisant des images de synthèse qui s’inspirent à la fois de la peinture – paysage ou all-over de ses récents tableaux – et de la sculpture. Pourquoi alors parler de collage ? Parce que la technique de composition en 3D est constituée de juxtapositions et de superpositions. La maquette (wireframe) qui constitue la forme des objets est emballée de textures, puis rehaussée par des jeux de lumière, le tout devant conduire aux fameux paysages de McLeod. Des trois œuvres présentées dans l’exposition Ailleurs, c’est certainement Black Yellow (2011) qui révèle le plus l’univers virtuel, du moins il l’explicite par la représentation de certaines formes du paysage au motif triangulaire du wireframe. Si l’artiste aime jouer avec l’illusion du réel, ce n’est pas celle du paysage, mais celle de la maquette traditionnelle. Les représentations schématiques des motifs qu’il construit s’apparentent à celles que l’on pourrait habituellement voir dans des modèles réduits. Dans Midnight Valley (2011), la forme des conifères ne s’approche-t-elle pas des représentations simplifiées de l’arbre habituellement utilisées dans les maquettes ? Mais le modèle réduit d’un paysage pseudo-réaliste devient irréel dès que le regard se pose sur les étranges nuages orbiculaires. Ailleurs, dans Secret Room (2011), la juxtaposition de motifs paysagers et d’espèces hybrides de type pseudo-végétal, pseudo-nuage, accentue la confusion volontaire entre réel et virtuel.

Chez Cliche et McLeod, le collage sert la transposition d’univers et exacerbe le croisement entre l’utopie et l’onirisme. 

AILLEURS 
Commissaire : Catherine Bolduc
Du 7 mars au 4 avril 2013