L’art contemporain a une place toute indiquée et très pertinente auprès d’adolescents du secondaire, ne serait-ce que pour leur faire découvrir une autre forme d’expression. À première vue, l’art contemporain peut paraître inaccessible, mais pour l’adolescent, il peut s’avérer un terreau fertile ainsi qu’un vaste terrain de jeu. Comme en témoignent plusieurs articles publiés dans Vision 1, notre revue spécialisée en enseignement des arts, l’instal­lation, l’intégration à l’architecture, l’esthétique relationnelle, le land art et même la performance sont abordés par de nombreux spécialistes en arts plastiques dans les écoles du Québec. Le but est d’enrichir l’expérience esthétique de l’élève, de l’amener à exploiter plusieurs techniques et de le sortir de sa zone de confort. Mais par où commencer ?

Quand les élèves abordent le cours d’art, une confusion des genres se présente. Ils perçoivent les styles publicitaires, l’esthétique formelle, le design de manière indifférenciée. Par la notion de démarche, les élèves comprennent pourquoi l’esthétique dépasse les aspects formels de l’œuvre. Les concepts deviennent la forme observée, l’œuvre étant le résultat et non pas l’objet. Par contre, la théorie a ses limites dans un cours de 75 minutes par semaine. Il s’avère ainsi plus judicieux de leur parler de démarches d’artistes qui sont en relation directe avec leur projet à réaliser. D’ailleurs, pour les amener à entreprendre un travail en art, il est intéressant de jouer le jeu de la profession, c’est-à-dire de les mettre dans la peau d’un artiste contemporain, et nous, enseignants, de jouer le jeu du commanditaire ou du commissaire. Cela fait en sorte que l’élève voit le processus de création comme une partie essentielle à l’élaboration d’un projet artistique.

La réticence des adolescents vient essentiellement de la perception d’inaccessibilité et de la réputation élitiste du milieu de l’art contemporain. Afin de désamorcer cette perception négative, il est bon d’aborder les démarches d’artistes qui toucheront de manière significative les élèves. Nous avons constaté qu’une œuvre comme Le socle du monde, de Manzoni, a généralement beaucoup de succès. Les élèves prennent conscience que l’objet porte en lui une charge historique, culturelle et conceptuelle, cela même au-delà de l’objet d’art, de sorte qu’ils pourront aussi questionner les images et les objets qui les entourent.

L’année dernière, comme amorce à un projet de murale en noir et blanc, nous avons présenté le collectif d’artistes graphiques En masse : en un premier temps pour toucher à l’aspect formel et technique et, en un deuxième temps, pour démontrer qu’il n’était pas nécessaire d’être un artiste contemporain pour créer en art contemporain. Par exemple, des artistes ont commencé leur carrière en étant architecte ou graphiste et ont ensuite bifurqué vers l’art contemporain.

Aborder une œuvre en classe par le truchement de la philosophie et de l’esthétique peut susciter la réflexion et le débat. La valeur de l’œuvre réside dans la démarche artistique et dans son histoire, et non pas seulement dans le talent et le génie qui y apparaissent. 

(1) La revue Vision est publiée par l’AQESAP depuis 1969 ; elle est une ressource unique pour les enseignants spécialisés en arts plastiques.