L’accompagnement par l’art en contexte hospitalier: Voir le corps autrement
La Faculté des arts de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) encourage l’établissement de liens avec différentes communautés : celles-ci constituent ainsi un milieu de formation motivant pour les étudiants et en retirent elles-mêmes un avantage pour leurs membres. Le cours d’accompagnement par l’art et d’éducation artistique dans la communauté s’adresse à des étudiants de premier cycle en art dramatique, arts visuels et médiatiques, danse, études littéraires et musique. L’objectif général du cours consiste à rendre des activités créatrices accessibles aux membres de groupes sociaux qui en sont privés à cause de leur état de santé ou de leur statut socio-économique. Les stages sont conçus en fonction des disciplines des étudiants grâce à des collaborations avec le milieu de la santé et différents organismes communautaires qui interviennent auprès d’enfants gravement malades, de jeunes à risque et d’adultes en situation de vulnérabilité. Les étudiants mettent en place des activités créatrices à partir d’un thème, des besoins des participants et de la mission de l’organisme d’accueil.
Une expérience d’accompagnement par l’art a été réalisée au Service de médecine des toxicomanies du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) à l’automne 2013. En voici un aperçu.
Les ateliers donnés au CHUM avaient pour thème Le corps vu autrement. Ce thème a été choisi parce qu’il met en valeur le corps, élément central non seulement dans l’art de la danse, mais aussi dans le rétablissement des personnes toxicomanes. Les ateliers avaient pour but d’amener les participants à questionner leur rapport au corps et à développer une nouvelle vision de celui-ci.
Les ateliers ont été divisés en trois sections : relaxation, activation et création. La relaxation a pour objectif de détendre les participants et de les rendre conscients de l’importance de prendre soin de son corps. Dans la partie activation, les participants se livrent à quelques exercices d’échauffement simples et à des activités ludiques, en duo ou en groupe. Cette partie de l’atelier les encourage à socialiser les uns avec les autres, ce qui demande un grand effort pour certains qui souffrent de difficultés de communication. Dans la troisième partie de l’atelier, les participants sont invités à explorer le mouvement « à des fins d’expression, de communication et de création1 ». Les activités proposées favorisent un contact avec soi et avec les autres « en faisant appel à la pensée intuitive, à l’imagination, au jeu et à l’analogie2 ». L’exploration du théâtre d’ombres et l’utilisation d’accessoires tels des masques ou des tissus permettent de créer une interface entre le participant et le regard des autres, voire de modifier l’apparence de son corps. L’une de ces activités de création est fondée sur l’utilisation de tissus souples, sous lesquels il est possible de se cacher, mais aussi de se recréer. La personne doit trouver des poses qui modifient la forme du corps, créant ainsi un jeu d’illusion.
La présence d’étudiants en art de l’UQAM dans différents milieux non traditionnels de l’art tel le CHUM contribue à humaniser l’espace de soins, en intégrant l’art dans la vie quotidienne des patients. Les participants y sont perçus autrement que par leur maladie ou leurs difficultés, et découvrent les bienfaits que la création peut avoir pour eux. Dans cet exemple précis, les activités créatrices proposées aux patients hospitalisés dans le Service de médecine des toxicomanies du CHUM leur ont permis de se projeter dans une autre réalité que la maladie et de découvrir qu’il est possible de s’exprimer, d’avoir du plaisir et d’entrer en contact avec les autres sans avoir recours à la consommation de substances.