Éditorial n°261 – Quelle place l’art occupe-t-il dans votre vie ?
Les chamboulements profonds que nous avons vécus en 2020 ont entraîné de grandes réorganisations. L’ensemble du milieu culturel n’a eu de cesse de se réinventer, voulant aussi demeurer solidaire avec les travailleuses et travailleurs de première ligne et participer à l’effort collectif pour ralentir la progression de la pandémie. Il fallait désormais atteindre son public différemment pour éviter que l’art ne devienne un vase clos, et proposer d’autres vitrines. La médiation était déjà importante avant la pandémie, mais elle régnera sans doute au cœur des modèles qui perdureront après la crise. Peut-être que cette nouvelle nécessité impactera les formes des œuvres mêmes, et qu’elle favorisera des initiatives communautaires ou qu’elle resserrera les liens entre l’art et sa société. Pour que l’art s’immisce encore plus dans les quartiers, dans les rues, dans les foyers et qu’il aille à la rencontre du public là où il est. Je persiste à croire qu’il existe cette idée tenace dans la société que « l’art ne concerne que l’art » et qu’insidieusement, nous lui nions son rôle économique, social, communautaire, identitaire. Pourtant, l’accès à l’art est un droit et non un privilège révocable en temps de crise – et ne tombez pas dans le piège en croyant autrement. Nous sommes en train de créer une perte collective immensément profonde en nous coupant de notre culture ; c’est à nous d’y remédier. Quelle place l’art occupe-t-il dans votre vie ? Avez-vous renouvelé votre intention d’aller à la rencontre de l’art ? Entrepris l’acquisition d’œuvres ou complété votre collection ?
Vous le savez, quand on s’intéresse aux arts visuels et médiatiques, on accède généralement à beaucoup d’autres contenus et on côtoie une diversité de points de vue, de récits, et de visions. Dans nos pages, par exemple, les œuvres de Jacinthe Loranger évoquent la mort, le temps qui passe, la désuétude ; celles de Deanna Bowen nous parlent de famille, de vie nocturne et de contextes urbains ; et Isabelle Hayeur, que l’on retrouve en couverture de ce numéro, de pollution, de gestion des plans d’eau, d’engagement citoyen… Difficile de ne pas constater, dans le contexte actuel, le petit glissement qui s’opère pour une revue d’art : nous devenons un point d’accès vers les œuvres (livré directement dans les foyers, qui plus est !). Et j’espère qu’en tournant ces pages, vous apprécierez les incursions artistiques que nous vous proposons.
Nous avons pensé le dossier thématique Mutations : arts, sciences et technologies bien avant la pandémie, dans le but de nous interroger sur la relation soutenue dans le temps que l’art, les sciences et les technologies entretiennent. Les autrices et auteurs regroupés dans le dossier entrevoient les ramifications qui proviennent des pairages interdisciplinaires dans la création contemporaine : réinvestir l’art comme une technique (Lynn Bannon), interpréter les données scientifiques de manière sensible (Gisèle Trudel), douter de l’appareil médical (Charlotte Jacob-Maguire), refuser l’utopie de la réalité virtuelle (Chélanie Beaudin-Quintin), et considérer les erreurs portées par le progrès dans les arts (Oli Sorenson). Dans le contexte où le paradigme de la production et de la croissance dans le système marchand arrive à un point de rupture, est-ce que d’envisager les fusions et les mutations multiples de l’art, des sciences et des technologies ne pourrait pas offrir les balises nécessaires pour entamer la création de formes et d’espaces encore impossibles à imaginer ?
Dans un effort d’actualiser notre mission qui réside dans l’information et l’éducation aux arts, et en réponse aux profondes mutations du secteur de l’information, nous avons entamé un grand chantier avec la création de notre nouveau site Internet mis en ligne en juin dernier. Je suis heureuse de pouvoir vous annoncer maintenant la venue imminente de notre refonte graphique : la revue, son format, ses rubriques et son logo feront peau neuve. Nous dévoilerons les fruits de ce changement dès le prochain numéro. Si nous ne prenons pas l’opportunité de nous réinventer dans ce moment sans précédent, qui force déjà la création de nouveaux modèles, quand pourrions-nous espérer voir advenir nos rêves les plus audacieux ? Est-ce que l’art ne pourrait pas avoir un rôle à jouer dans cette réinvention ?
D’ici là, laissez l’art vous habiter et osez imaginer des lieux communs à la hauteur de vos aspirations en ce début d’année.
Prenez soin de vous,
Jade Boivin
Donnez vie aux arts
Alors que 2020 referme (enfin) ses portes et que 2021 nous ouvre grand les siennes, nous voulions vous remercier : c’est grâce à votre fidélité que notre deux dernières années. Nous avons musclé l’équipe en embauchant deux salariés supplémentaires, lancé un site Internet moderne, renouvelé notre ligne éditoriale… Avec, toujours, cette même envie : retrouver ce mélange d’avant-gardisme et d’accessibilité qui fait la force de Vie des Arts depuis sa création.
La suite ? Nous avons besoin de vous pour l’écrire ! Pour Vie des Arts, 2021 sera une année charnière puisqu’une nouvelle formule se prépare. Nous sommes certains qu’elle saura vous surprendre par sa modernité, mais surtout vous charmer par son désir palpable de donner vie aux arts. Toute la mission de la revue est contenue dans cette simple formule. Et voilà soixante-cinq ans que nous la menons à bien. Même en cette année ô combien difficile pour le milieu, nous avons réussi à mettre en valeur pas moins d’une cinquantaine de lieux d’exposition et deux cent trente artistes ! Qui dit mieux ?
Soutenir Vie des Arts, ce n’est donc pas seulement appuyer une revue : c’est aider tout l’écosystème artistique québécois. Un écosystème dont nous avons besoin.
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À votre tour, donnez vie aux arts !
Julien Abadie