Vous êtes dans votre classe et vous donnez un cours magistral sur un artiste connu. Durant votre présentation, un élève vous pose la question suivante :
« Monsieur, combien ça vaut, cette œuvre ? » et surtout, « Pourquoi ? ». Et vous, de votre côté, vous restez un peu pantois devant cette question : après tout, comment répondre sincèrement à cette question ?

Nous sommes deux enseignants en arts plastiques au secondaire, amateurs d’art contemporain. Nous sommes allés à la semaine des arts de New York, la Artweek, pour nous ressourcer, nous inspirer et pour sortir des sentiers battus du milieu de l’art local. La Artweek est un événement qui réunit plusieurs approches en art, avec une démarche mercantile. Il est plaisant de voir d’autres façons de faire et d’autres manières de percevoir l’art. Pour nous, cette « formation continue » contribue grandement à maintenir
un engouement pour notre métier et pour entretenir notre passion pour l’art.

Ici, on expose des arguments de vente dans le but de faire des affaires. On ne peut qu’être dépaysés face à cette façon de faire, nous Québécois formés à l’UQAM, où le fait de parler du marché commercial semble tabou. Effectivement, dans notre formation d’enseignant en arts plastiques, on a davantage parlé de Rousseau, du rapport Parent et d’artistes contemporains locaux que du marché de l’art. Pourtant, une question revient constamment dans nos classes, celle de la valeur marchande de l’œuvre et des raisons qui font d’elle une œuvre.

Pour tout le monde, la question de la valeur d’une œuvre d’art est légitime, et nous pensons qu’il est essentiel de se la poser. Il est intéressant de constater que dans le programme de formation collégiale, aucun cours en économie n’est obligatoire et qu’au secondaire les cours d’économie sont totalement absents. Pourtant, pour comprendre le monde dans lequel on vit, il s’avère essentiel de comprendre les fondements de l’économie. Avant d’aborder le domaine du marché de l’art avec nos élèves, il semble que quelques notions d’économie s’imposent : l’offre et la demande, et leur dynamique. Pour la question de la valeur de l’art, il convient d’amorcer la discussion avec un exemple qui les touche ; les marques et l’engouement pour certaines griffes pourraient être un bon point de départ. Généralement, la reconnaissance d’une marque est sujette à la promotion qui en a été faite. Deux produits équivalents du point de vue du goût ou de la qualité ne provoquent pas nécessairement la même fascination de la part du consommateur. Il en va de même pour une œuvre d’art.

Nous avons été témoins, dans les nombreux artshows, de l’importance qu’accordent les galeristes au prestige new-yorkais afin de mousser la réputation de leurs artistes et de convaincre les acheteurs. Et convaincre coûte cher. Il ne faut jamais perdre de vue que le galeriste prend un risque en représentant un artiste. Il mise sur une œuvre, une carrière et sur un créateur qui devra demeurer à la fois cohérent et inspiré et dont les productions, idéalement, prendront de la valeur avec le temps.