Des acryliques sur toile de Julie Gosselin émane une irrésistible jubilation. L’artiste prend un plaisir fou à entrelacer couleurs et formes, à jouer des effets de contraste et de complémentarité.

Julie Gosselin amalgame les tons les uns contre les autres, les uns avec les autres.

La série de tableaux qu’elle vient d’entamer s’intitule Panoplie de couleurs. La jeune artiste – elle a 25 ans – explique que l’aventure que représente pour elle l’élaboration d’un tableau consiste à provoquer la surface pour que, par la suite, la prolifération des couleurs vives dont elle sera recouverte provoque l’œil. Elle travaille avec des pigments dont elle maîtrise partiel­lement l’étalement. « Je traite un peu le hasard comme un partenaire, commente-t-elle. Je le laisse aller au gré des caprices des textures, des consistances plus ou moins fluides des matières, des lois de la gravité… Mais je le guide aussi : je profite de la stimulation des formes inattendues qu’il peut m’offrir pour, en guise de réponse, en susciter par moi-même de nouvelles. »

Il est difficile de déterminer si Julie Gosselin est en dialogue avec la toile ou bien avec les surprises – fruits du hasard – qui surgissent de son geste spontané et premier. Ce geste consiste à étaler de la couleur à l’état de pâte semi-liquide et à la laisser s’étendre un peu, beaucoup, juste ce qu’il faut. Et puis l’artiste recommence ailleurs, à un autre endroit de la surface. Une fois ces premières formes séchées, Julie Gosselin en étale de nouvelles qui couvrent les zones restées blanches, mais qui se superposent aussi partiellement aux premières, créant des effets de transparence et de luminosité. Couche après couche, elle sature ainsi toute la surface de ses toiles.

Il est aisé de constater que la sarabande des taches, des volutes, des arabesques et des contorsions de toutes sortes ainsi produites voguerait volontiers hors du plan du tableau. « Je laisse à l’œil la latitude de poursuivre les mouvements hors du cadre ; c’est la place offerte à l’imagination du spectateur », déclare-t-elle. Il faut y voir sans doute la promesse qu’un jour prochain l’artiste affrontera de grands formats.

Titulaire récente d’un baccalauréat en enseignement des arts de l’UQAM, Julie Gosselin a présenté publiquement une première toile à l’occasion de l’exposition des finissants au printemps 2013. Elle a suivi les cours de Mario Côté, peintre et professeur chevronné, auquel elle reconnaît qu’il a su lui faire prendre conscience de l’avantage qu’elle aurait à canaliser une exubérance peut-être excessive. Elle a adopté ce conseil. Elle est redevable également à Jérôme Bouchard, autre maître, de lui avoir appris les techniques de la peinture (aquarelle, huile, tempera, etc.) sans lesquelles il n’y a pas d’art, c’est-à-dire pas de dialogue avec le réel, en l’occurrence chez Julie Gosselin l’expression d’une sensuelle et irrésistible jubilation.