L’attachée de presse est juchée sur la pointe de ses deux pieds. Le micro n’a pas été réglé à sa taille, mais à celle de l’artiste que toute la salle attend impatiemment. Tiens, la voilà qui arrive, justement !

Marie Chouinard monte les marches du podium.

Elle porte un pantalon rouge écarlate et des baskets dont la semelle compensée la fait apparaître plus immense encore. Ses longs cheveux blonds tombent en cascade dans son dos. Des lunettes en strass entourent ses deux grands yeux malicieux.

Arrivée au micro, elle remercie les éditions du passage, sans lesquelles rien de tout ça n’aurait été possible. Merci, merci, merci !

Marie lance des baisers au loin.

Puis elle saisit à deux mains une liasse de papier qu’elle porte à son visage et commence la lecture.

Marie Chouinard qui fait la lecture d’extraits de « Zéro Douze »
au Musée d’art contemporain de Montréal, 21 septembre 2019.
Photo : Sylvie-Ann Paré. Avec l’aimable permission de l’artiste

C’est une histoire que la Marie Chouinard d’aujourd’hui aurait pu raconter à la petite fille qu’elle était il y a déjà plusieurs dizaines d’années : celle d’une immense chorégraphe et interprète qui se prend d’amour pour les mots et qui publie Zéro Douze, onze ans après un premier recueil de poèmes intitulé Chantier des extases. Cette fois, ce sont mille anecdotes ayant marqué l’enfance de l’artiste entre zéro et douze ans qui sont compilées au sein d’un ouvrage illustré de sa main. Des anecdotes légères et amusantes, parfois un peu tristes, qui auront probablement contribué à ses choix de carrière. Des événements et des sensations, rien d’autre finalement que la mémoire d’une danseuse…

Dans le cadre de l’exposition présentée par le Musée d’art contemporain de Montréal (MAC), une vingtaine de dessins et de textes associés, tous extraits de l’ouvrage Zéro Douze, sont présentés dans l’espace libre de la Rotonde. La mise en scène est aussi simple que le sont l’écriture et le trait : deux cadres blancs juxtaposés, un pour les images et un pour les mots, accrochés en série sur les colonnes et les murs périphériques. Nul besoin de billet pour déambuler entre les diptyques, on va, on vient, on rentre dans une histoire puis on en ressort, on sourit ici et on verse une larme là. Le langage est simple et parlera à tous, ne manquant pas de réveiller nos propres souvenirs d’enfance.

Période de rentrée littéraire oblige, les événements foisonnent, et la publication de Zéro Douze par les éditions du passage s’associe opportunément au Festival international de la littérature (FIL). Outre ce lancement au MAC, ce seront donc trois événements qui graviteront autour de l’ouvrage, parmi la cinquantaine de manifestations organisées par le festival. Marie Chouinard sera ainsi de retour au MAC pour deux lectures supplémentaires, et donnera une véritable lecture-spectacle au sein de la Grande Bibliothèque. Des performances à ne pas manquer car, comme elle nous l’a prouvé ce mercredi soir, elle est une vraie interprète, du corps comme de la parole. À travers ses intonations et son flux, sa voix danse pour exprimer autrement ce que montrent les dessins et ce que disent les mots.


ZÉRO DOUZE
Exposition dans la Rotonde du Musée d’art contemporain de Montréal
Du 17 au 29 septembre 2019