Léducationet l’action culturelle : une longue tradition au Musée des beaux-arts de Montréal
Sept jours sur sept, ça fourmille aux Studios Art et Éducation Michel de la Chenelière du Musée des beaux-arts de Montréal. Que ce soit lors d’une sortie scolaire ou d’une activité familiale, les enfants et les jeunes, ainsi que leurs enseignants et leurs parents, sont invités à la découverte des œuvres du Musée par la médiation culturelle et les ateliers de création. Ils répondent. Ils sont présents. Ils participent. Ils apprécient. Et très souvent, ils reviennent.
L’éducation est depuis fort longtemps une priorité au Musée des beaux-arts de Montréal, dont le Service de l’éducation et de l’action culturelle vient de souligner ses 50 ans. Le travail accompli, au fil des ans, par des piliers de l’action éducative, Hélène Lamarche, Hélène Nadeau, Marc Pitre, Diane Chayer Saint-Louis, inspire encore toute l’équipe actuelle. L’accueil des écoliers et des jeunes, lors d’une sortie scolaire, fait partie du paysage du Musée.
Durant la semaine, les élèves découvrent le musée
De septembre à juin, quelque 60 000 élèves fréquentent le MBAM. Tous les matins, 24 éducateurs du Musée accueillent chacun un groupe. Ils répondent à des motivations diverses : visites de l’exposition temporaire avec animation, programmes de chasse au trésor dans le musée ou repérage d’œuvres que l’enseignant a proposées à ses élèves en classe. Habituellement, chaque activité muséopédagogique se termine par un atelier de création. Pour Jean-Luc Murray, directeur du Service de l’éducation et de l’action culturelle, l’accueil des scolaires « est une belle aventure : on ne peut plus reculer. [Pour les élèves], vivre quelque chose de signifiant dans un lieu comme celui-ci revêt une vraie valeur. L’offre va s’adapter et se bonifier en fonction des clientèles. » En accueillant les groupes scolaires avant 11 h, le Musée permet aux visiteurs adultes d’apprécier, dans le calme, les grandes expositions temporaires et toutes les œuvres du musée.
Des œuvres d’élèves du secondaire dans l’espace d’exposition
Au printemps 2013, des élèves de 5e secondaire d’une école de Mascouche ont concrétisé, avec leur enseignant d’arts plastiques, le projet « Le labyrinthe sonore », en partenariat avec le Musée. Avec une dizaine de cubicules de deux mètres de haut et d’un mètre de profondeur, les élèves, en équipe de trois, « ont créé des stations qui les racontent et qui représentent leur réalité d’adolescents ». Une production réalisée par des élèves non voyants a particulièrement capté l’attention du visiteur, tant par l’aspect plastique et le choix des objets que par l’écoute de l’émouvant message sonore (en audioguide) qui l’accompagnait. Le vernissage de cette exposition a attiré un nouveau public : des parents et des amis des élèves, pour lesquels c’était la première visite au Musée. Jean-Luc Murray sait à quel point il est difficile d’amener des adolescents au musée ; il est donc conscient que cette activité est révélatrice du haut degré d’engagement de certains enseignants et de certaines écoles. Il y a eu, l’année dernière, huit projets majeurs avec des établissements scolaires de tous les niveaux.
Une présentation éducative des réalisations artistiques d’élèves du préscolaire et du 1er cycle du primaire
Par le projet « De l’âne au zèbre », composé d’une centaine d’assiettes et de décorations murales de cartons recyclés puis peints, le visiteur est amené à comprendre le travail de collaboration entre le MBAM et le Programme de l’école montréalaise pour tous. Le thème des animaux ayant été retenu et illustré par des œuvres de la Collection du MBAM, les éducateurs du musée et 22 enseignants de 11 écoles sont convenus des étapes nécessaires à sa réalisation : une session de formation pour les enseignants, une rencontre préparatoire à l’école avec un éducateur du Musée, une visite interactive de l’exposition, suivie d’un atelier avec les élèves au musée. Puis, les éducateurs se sont rendus une deuxième fois en classe pour achever les projets artistiques amorcés au musée. Les résultats, exposés dans l’espace éducatif du musée, « reflètent le plaisir et la stimulation » des élèves dans un projet éducatif et artistique.
Programme « Un coup de pouce aux familles »
Toujours en lien avec le Programme de l’école montréalaise, certains élèves (de 11 ou 12 ans) deviennent, à la suite de leur visite en groupe scolaire, guides auprès de leurs parents qui entrent au Musée pour la première fois. Jean-Luc Murray explique que « pour la réalisation de cette activité, c’est l’enfant qui a convaincu ses parents de venir au Musée. C’est l’enfant qui décide, qui amène ses parents ». Le Musée planifie le déplacement en bus, accueille les parents et supervise la visite des élèves guides et de leurs invités. C’est un moment de grande découverte – du lieu, de l’institution et des œuvres – qui enrichit le lien familial et favorise la socialisation entre les parents. Plusieurs demandent de revenir.
Musée en partage
Le Musée ouvre ses portes à des populations plus fragilisées sur le plan psychologique, physique, mental ou social. Marlyn Lajeunesse conçoit des programmes adaptés à chaque problématique. Le Musée a, notamment, tissé des liens avec des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, d’une déficience intellectuelle, ainsi qu’avec des itinérants de l’église Saint-James et des jeunes sans-abri de la roulotte du Père Emmett Johns. Une révélation : ces personnes, de tous les âges, affirment avoir besoin du Musée. Habituellement exclues du monde de la culture, elles ressentent la chance de vivre de belles expériences au Musée, par la découverte des œuvres et par la création dans les ateliers : beaucoup y trouvent même un dispositif thérapeutique.
Un dimanche typique au Musée dans de nouveaux locaux pédagogiques
Un dimanche d’avril 2013, dans les sept salles des studios Art et éducation, des enfants et leurs parents, tous concentrés sur leur tâche, dessinent, découpent, peignent en s’inspirant d’un objet de l’exposition Pérou. Des éducateurs déambulent de table en table pour répondre à des questions relatives à une technique, aident à la réalisation de l’œuvre, encouragent ceux qui doutent de leurs habiletés. Ils goûtent le plaisir de la création et la joie partagée de se retrouver en famille dans un musée d’art.
Les studios Art-Éducation de la Chenelière, inaugurés en septembre 2012, ont permis de doubler la fréquentation scolaire et, fait nouveau, ont accueilli plus de 40 000 familles (de septembre 2012 à mai 2013). Pour l’équipe du Service de l’éducation, « ce que l’on vit depuis le début prouve que c’était nécessaire. C’est un projet qui répond aux attentes. Les gens se sentent bien dans ces lieux-là. Les familles se sont approprié les espaces [studios et lounge] et participent aux activités ». De plus, il est important de rendre agréable cette sortie au Musée, puisque les études en muséologie démontrent que le musée d’art (beaux-arts et art contemporain) est le plus difficile d’accès, loin derrière les musées de sciences, d’histoire, d’archéologie, de civilisation ou de société qui arrivent en tête des fréquentations.
D’autres projets
Dans les espaces du 5e pavillon (le projet de sa construction a été annoncé en avril dernier), l’équipe du Service de l’éducation se prépare déjà à recevoir des poupons et leurs parents. Des expériences menées dans d’autres musées en Europe et aux États-Unis confirment la magnifique réception des programmes consacrés aux 0-4 ans. Le Service veut aussi améliorer l’offre culturelle auprès des enfants du préscolaire, bien que la priorité demeure l’accueil des élèves du primaire et du secondaire. Toutefois – il faut le souligner et des expériences l’ont démontré –, une meilleure coordination des programmes universitaires de formation à l’enseignement et de ceux des institutions muséales permettrait au Musée de concentrer davantage ses forces à la création de programmes plutôt qu’aux activités d’initiation à la visite au musée.