Coucher sur ses tableaux la multitude de paysages intérieurs qui l’habitent est pour Cécile Buysse le bonheur ultime. Elle peint, dit-elle, parce qu’elle n’a pas de mots, ou si peu. Coloriste, quel bonheur c’est, pour elle, d’explorer en toute liberté… la couleur !

Fondement de sa démarche artistique depuis bientôt vingt ans, la couleur, vive et profuse, anime son espace pictural dans un foisonnement de formes et de traits façonnés à la spatule avec spontanéité1, voire insouciance. Revendiquant l’approche intuitive abstraite des automatistes, Cécile Buysse fait vite émerger du chaos naissant ses états d’être : des structures parmi lesquelles se heurtent et se chevauchent nombre d’aplats furtifs ou prépondérants, plans et géométries vibrantes, formées de triangles, d’ellipses et de carrés.

Au sein de la matière dense qui chahute, peinte à l’huile, on distingue parfois, par endroits, de fins tracés au pastel en guise d’échos à peine perceptibles de ces autres mondes si doucement circonscrits, par exemple, par des tons de vert mousse, de taupe et de beige doré (Un dimanche à la campagne).

Les traits verticaux et elliptiques colorés ou encore soulignés par des tracés blancs (On a dansé sur la lune) tranchent dans la masse picturale. Ce sont des forces en mouvement, à la manière de flèches (comme dans les toiles de Rita Letendre), qui forcent le regard à se poser non pas objectivement, mais de façon subjective, de l’intérieur vers l’extérieur du tableau.

Méditation sur la beauté

Cécile Buysse prend pleinement conscience de l’espace pictural, certes à travers son observation des choses, mais aussi dans ses travaux en monochromie vers lesquels l’a dirigée Guido Molinari, qui fut l’un de ses professeurs. Peut-on établir un parallèle entre l’énergie qui se dégage de ses créations et la posture de Molinari sur la fonction couleur-énergie ? Cécile Buysse travaille les couleurs, mais ce sont les rapports entre les couleurs, leur tonalité, leur saturation et leur vibration entre elles qui l’occupent, car ce sont ces rapports qui créent dans l’œuvre de la coloriste toute la profondeur.

Sa gestuelle témoigne aussi d’une préoccupation esthétique. Elle note : « Depuis quelque temps, ce qui s’impose davantage, c’est la mise au service de ce que l’on peut appeler beauté, quête possible d’une forme de transcendance. »

Installée depuis peu à la campagne, elle habite une maison lumineuse qui lui sert aussi d’atelier, au sein d’une nature ouverte et belle, dit-elle. De fait, elle se sent plus sereine, étant plus proche des saisons et de ses œuvres en production. Cécile Buysse expérimente aussi un nouveau format : le rectangle (On a dansé sur la lune, Tout était si léger). Dans ses récentes compositions, le mouvement est plus ample, plus fluide, faisant souffler l’épure et la douceur entre le vide et le plein (Plus de mots) et plus de plénitude avec ses sphères aux tons feutrés. Autant de nouveaux univers printaniers à découvrir ! 

(1) Voir Vie des Arts, Vol. 50, n° 202, 2006, p. 60 et Vol. 45, n° 182, 2001, p. 71.

CÉCILE BUYSSE L’INDICIBLE
Galerie Valentin, Montréal
Du 16 au 30 mars 2013