De plus en plus de municipalités démarrent des projets d’art public, y compris des villes d’envergure moyenne, comme Sainte-Thérèse. L’an dernier, en conformité avec sa politique culturelle, la Ville a décidé de mettre sur pied un événement au parc du Jardin des Sources. Cette ancienne carrière de gravier, devenue par la suite un dépotoir clandestin, garde encore des traces de son passé. La nature y a été perturbée, du béton et des amas de pierre artificiels se rencontrent çà et là. Toutefois, le boisé se régénère et des étangs se sont créés spontanément dans des creux. C’est dans ce contexte urbain que s’est tenu l’événement Paysages au jardin, sous la direction de l’artiste et commissaire Suzanne FerlandL, fondatrice du Sentier Art3 au Parc régional du Bois de Belle-Rivière,
à Mirabel.

Provenant tous du Québec, les artistes ont travaillé sur place durant deux semaines pour réaliser leur(s) œuvre(s). Il leur fallait employer des matériaux naturels, si possible tirés du site et ne pas polluer les lieux. La plupart des artistes ont utilisé des branches ou des troncs, certains ont apporté leurs matériaux.

À proprement parler, aucune œuvre n’était spectaculaire, ce qui est loin de démériter en art in situ. Certaines demandaient un bon sens de l’observation pour être découvertes (avant la pose des cartels). Cette finesse de l’insertion est à mon sens la plus grande qualité de l’in situ, entraînant une attention à la nature et à la façon dont les œuvres sont intégrées. Plusieurs artistes s’inscrivaient dans un courant que le philosophe Gilles A. Tiberghien nomme « art végétal », dont l’un des plus connus est le britannique Andy Goldsworthy. Tissées ou produites à même le matériau naturel, exigeant d’intenses efforts de fabrication éphémères, ces œuvres sont des témoignages de la création en acte.

Disséminées à divers endroits du parc, les œuvres incitaient à le parcourir et ainsi mettaient non seulement le regard, mais aussi le corps en mouvement.

Dans cet esprit de revalorisation du geste artistique et aussi des techniques anciennes, Nathalie Levasseur a utilisé quenouilles et prêles pour fabriquer un long ruban à la forme suggestive qu’elle a enroulé autour d’une branche basse de l’arbre le plus majestueux du parc, un immense saule pleureur. Utilisant des techniques de chapellerie pour tresser les chapeaux de paille, elle réinvente ce savoir-faire en guise d’hommage aux multiples facettes de la nature, la quenouille étant aussi un dépolluant naturel. Le duo d’artistes Zoné vert, constitué de Christine Juillard et Michel Bachelet, a parsemé le site de délicates œuvres sur le thème de la quadrature du cercle. Travaillant en trompe-l’œil, les artistes ont su intriguer le regard en changeant la perception des œuvres selon la place du regardeur, proche ou lointaine. Au delà du jeu des figures géométriques, le thème résonne en écho aux changements climatiques.

Disséminées à divers endroits du parc, les œuvres incitaient à le parcourir et ainsi mettaient non seulement le regard, mais aussi le corps en mouvement. Elles sont d’ailleurs pour la plupart toujours visibles plusieurs semaines après la fin de l’événement. Respectueuses de la nature et souvent réflexives, elles font espérer d’autres éditions de cet événement dans les années qui viennent.


(Événement)

PAYSAGES AU JARDIN
ARTISTES : NATHALIE LEVASSEUR, MARIE-ÈVE MARTEL, PIERRE TESSIER ET SUZANNE RICARD, KATHLEEN VAUGHAN, MARC WALTER, ZONÉ VERT
COMMISSAIRE : SUZANNE FERLANDL
PARC DU JARDIN DES SOURCES, SAINTE-THÉRÈSE
DU 14 AU 27 SEPTEMBRE 2020

Zoné vert, La quadrature du cercle (2020)
Photo : Ville de Sainte-Thérèse